Actualités de la Ville de Chartres

Outils et services

Outils et services

Désartificialisation : « c'est affaire de développement, de bon sens et d'équilibre »

Jean-Pierre Gorges, maire de ChartresInterview et portrait

20 juillet 2024

La loi ZAN de juillet 2023 entend limiter drastiquement l'étalement urbain et la consommation d'espaces naturels. Un enjeu de développement derrière cet objectif de sobriété foncière. Désartificialisation, renaturation… derrière ces mots, le maire Jean-Pierre Gorges décrypte la stratégie chartraine.


Votre Ville : Réduire la consommation d'espaces naturels, est-ce un véritable enjeu de développement ?

Jean-Pierre Gorges : Derrière les objectifs de la loi Climat et Résilience, il s'agit de limiter l'étalement urbain et la consommation d'espaces naturels agricoles et forestiers. Première étape d'ici 2031, la diminution de moitié du rythme de consommation de ces espaces par rapport à la période 2011-2021. Cette loi, louable, pose question dans un pays qui veut retrouver une industrie, qui affiche un besoin de 500 000 logements neufs par an, etc.

Comme toujours en effet, le diable se niche dans les détails des décrets d'application. C'est ainsi que les terrains de sport, les bases de loisirs et les golfs sont considérés comme artificialisés, de même que les jardins de l'habitat et autres espaces verts résidentiels, tout ou partiellement… Imaginez le casse-tête ! On a ainsi vu récemment une ministre appeler à l'abandon par les Français de leur rêve de maison individuelle, dans un pays où l'espace ne manque pas si l'on compare la France à d'autres pays européens.

Ajoutez à cela que la comptabilisation de ces espaces se fait au plan national avec des déclinaisons régionales. Et donc l'objectif, ô combien technocratique, de 50 % de diminution n'a évidemment pas les mêmes conséquences dans une ville qui a artificialisé à tout va pendant les dix dernières années ou dans une cité comme Chartres qui a très peu artificialisé. C'est pourquoi je me suis battu au niveau régional pour que cet objectif de division par deux soit pondéré par une péréquation entre les bilans des différentes villes de la Région. Il serait en effet particulièrement injuste que l'interprétation de la loi bénéficie aux mauvais élèves, c'est-à-dire à ceux qui ont pratiqué un étalement urbain anarchique.

L'enjeu est simple mais décisif pour la Ville comme pour l'Agglo : continuer à pouvoir nous développer.

VV : Vous affirmez que depuis 2001, la Ville a peu consommé d'espaces naturels ?

JPG : Nous avons essayé d'articuler rationnellement urbanisation et développement, en évitant par exemple la multiplication des zones d'activités, que ce soit à Chartres ou dans l'Agglomération. Ou encore en pratiquant une densification douce de l'habitat. Ainsi à Chartres, nous chassons depuis des années ce que j'appelle les « dents creuses » : ces maisons, ces immeubles avec leur terrain plus ou moins à l'abandon pour des raisons diverses, juridiques, successorales… De même, au niveau intercommunal, nous avons encouragé nombre d'entreprises à quitter les zones urbaines denses pour rejoindre les zones d'activités, le Jardin d'entreprises ou les pôles ouest. Et surtout, nous avons entrepris de réutiliser nos grandes friches industrielles.

VV : Vous pensez au Pôle Gare par exemple ?

JPG : Ce sont 32 hectares en cœur de ville et d'agglomération que nous sommes en train de finir de réaménager. Il n'y a pas que la gare elle-même. Songez que nous avons installé là un parking qui en surface aurait occupé 2 hectares et demi, un nœud intermodal en hauteur, la grande salle du Colisée. Celle-ci placée à l'extérieur aurait occupé 10 hectares ! À la place de la zone Sernam, vous allez trouver des habitations non loin d'un mail commercial et d'une maison de santé. Tout cela à la place d'une immense friche urbaine polluée et polluante. De même quand nous avons acquis les terrains immenses et pollués de l'ancienne base aérienne 122. Quand nous y installerons une plaine sportive et de l'habitat, nous ne consommerons pas de surface naturelle supplémentaire puisque ces espaces sont déjà artificialisés.

VV : En matière d'habitat justement, comment avez-vous procédé ?

JPG : Nous n'avons pas détruit des quartiers pour les reconstruire à côté. Nous les reconstruisons sur eux-mêmes au rythme des habitants en obligeant tous les promoteurs à installer en sous-sol deux places de stationnement par logement construit au-dessus.

Regardez l'ancien Beaulieu avec ses grands bâtiments séparés par d'immenses parkings en plein air. Les nouveaux immeubles des Petits-Clos, plus petits, moins hauts, mieux isolés, sont reliés par des mails et des espaces de verdure.

C'est la même philosophie qui va guider la restructuration de la Madeleine, un immense quartier qu'il faut désenclaver, aérer et verdir, sans mettre les voitures des habitants hors-la-loi, mais en les cachant en sous-sol pour rendre la surface aux habitants, à des jardins… Le transfert de la zone Carrefour de l'autre côté de l'avenue Jean-Mermoz, dans une zone déjà artificialisée, nous y aidera. Là encore, nous désartificialiserons en partie 20 hectares pour les habitants de la Madeleine. Et les jours de fortes pluies, les eaux pourront s'infiltrer dans le sol au lieu de dévaler les pentes vers Saint-Chéron et les rues des bords de l'Eure.

VV : Comment avez-vous développé cette stratégie ?

JPG : C'est affaire de bon sens, de méthode et de persévérance. Vous trouvez ainsi le même processus à l'œuvre à la Courtille où des logements sont installés sur l'emplacement de l'ancienne piscine.

Prenez seulement l'ancien site de la Chambre des métiers et de l'artisanat : il était artificialisé à 83 %. Il ne le sera plus qu'à 50 ou 55 %. L'épisode des « trois marronniers » illustrait bien notre refus de ce qu'il faut bien appeler l'idéologie de l'écologie punitive. Les mêmes qui faisaient un fétiche politique de ces trois arbres, qui seront remplacés, voulaient installer le complexe cinématographique, aujourd'hui en centre-ville, dans les champs autour de Chartres. C'est-à-dire remplacer la nature par des voies bitumées et des constructions en béton desservies par de nouvelles lignes de bus dont nous avons démontré qu'elles auraient été superflues et coûteuses.

Autre exemple, le dernier en date, nous aidons Novo Nordisk dans son immense projet industriel en lui cédant l'espace – déjà artificialisé – de notre centre technique municipal (CTM) pour réinstaller celui-ci sur l'ancien site Maflow, déjà artificialisé lui aussi. Bilan : zéro artificialisation !

VV : On parle beaucoup également de « renaturation » ? Qu'est-ce que cela vous inspire ?

JPG : Notre objectif est de favoriser une ville agréable, aérée, pas de rentrer dans un débat idéologique sans objet. Quand les Gallo-romains ont installé une ville sur le site de Chartres, ils venaient de la forêt et des champs environnants. Ils ont créé ici un lieu de rencontre religieux, commercial, artisanal. Ils ne sont pas venus y planter une forêt supplémentaire !

En 2001, nous avons trouvé ici 8 000 arbres d'ornement. Nous les avons identifiés, numérotés, entretenus. Depuis, nous en avons ajouté 3 000 et nous finirons d'en planter 1 000 autres d'ici la fin du mandat. Et au milieu coule une rivière… l'Eure, bordée par un Plan Vert exceptionnel qui traverse toute l'Agglomération. Pareille zone naturelle en zone urbanisée est exceptionnelle. Mais dans les 80 hectares du Secteur sauvegardé de la ville historique, la nature doit être contrainte pour des raisons évidentes.

Souvenez-vous de l'affaire de la place du Cygne, quand nous avons réaménagé cet espace aux sols abîmés, presque dangereux, et remplacé des arbres en mauvaise santé, dont les racines crevaient les plafonds des caves en-dessous, détruisaient les réseaux divers qui permettent la vie de ses habitants, bouchaient leur vue l'été, etc.

Personne aujourd'hui ne se plaint des nouveaux arbres évidemment plantés de manière à contenir l'expansion de leurs racines. Du bon sens, tout simplement. Par ailleurs, nous n'avons pas cessé d'implanter et d'ouvrir des parcs dans cette ville, depuis vingt ans. De Rechèvres à la Roseraie, des Clos à Jacques-Grand à la Madeleine, aux Pastières, etc. Nous avons fait évoluer leur conception : plus de pelouses interdites aux enfants. On peut y marcher, on n'y plante plus seulement des arbres d'ornement mais aussi des arbres fruitiers à libre disposition.

Les habitants de la Mare-aux -Moines avaient eu la primeur il y a quinze ans de ces espaces plus naturels, propices à la biodiversité, le tout sur un sol autrefois pollué…

Conclusion : pas question de créer une forêt dans la ville, ce serait pour le coup « contre nature », surtout quand les Chartrains habitent une ville avec la nature à leurs portes. Nous saurons raison garder car la décroissance, prônée par certains, n'est qu'un lent suicide qui ne peut déboucher que sur l'augmentation des dépenses par habitant et donc des impôts. La nature et les arbres méritent de vrais défenseurs.


Dossier Désartificialisation

Désartificialisation : « C'est affaire de développement, de bon sens et d'équilibre ».

Chartres, au top de la nature en ville.

Requalification urbaine : reconstruire la ville sur la ville.

Rénovation urbaine : des espaces verts à la place des parkings.

Projets urbains : liaisons douces.

Éco-Ville : « planter et végétaliser, c'est offrir une meilleure qualité de vie à chacun ».

Téléchargez gratuitement l'application Chartres

Cliquer pour accéder à Google Play (nouvelle fenêtre)

Cliquer pour accéder à l'App Store (nouvelle fenêtre)

Rejoignez-nous

Facebook – Ville de Chartres     Twitter – Ville de Chartres

YouTube – Ville de Chartres    Instagram – Ville de Chartres